Farhad Ostovani – « Deux Femmes »

A première vue il ne s’agit que d’une photo banale en noir et blanc représentant deux femmes dans une chambre, qui semblent étrangères l’une à l’autre. L’une est debout au fond de la pièce en train d’arranger ses cheveux, l’autre, assise sur un fauteuil, est au premier plan, de profil, regardant droit devant elle. Elles sont séparées par un grand espace vide, souligné par une verticale qui partage le mur du fond entre une partie claire et une partie sombre.
Pourtant, lorsqu’il découvre cette photo en 2005, Farhad Ostovani est fasciné. Il ne peut détacher ses yeux de l’image montrant sa mère et sa grand-mère. « Dès ce premier regard, après des années, je cherchais déjà quelque chose dans cette image et je n’arrivais pas à comprendre quoi ! »
Dès lors, il va s’en inspirer, comme s’il voulait faire revivre un moment du passé. Pendant 18 années, Farhad Ostovani, s’engage dans un travail de création. Il dessine d’après la photo, essayant de comprendre ce qu’il cherchait. De l’original il fait des copies, qu’il agrandit, coupe, recompose, réarrange, comme des variations musicales, s’attachant à ne pas se laisser submerger par l’émotion.
Aujourd’hui il y a quarante esquisses, beaucoup d’études, des dessins et neuf grand travaux inachevés ainsi qu’un livre et une vidéo du carnet d’esquisses. Ces œuvres sont empreintes de nostalgie, mais en soumettant l’image à tous ces traitements, il la rend à la vie et approfondit le mystère de cet instant suspendu. En regardant son travail Farhad Ostovani se demande : « Mais qu’est-ce que je cherchais ? A déterminer la signification de ce moment si ancien ? Ou bien l’important, tout au long de ce travail n’aura-t-il pas été le voyage lui-même et la longue, fidèle, et enrichissante méditation. »

Farhad Ostovani est né le 14 octobre 1950 à Lahidjan, dans le nord de l’Iran, près de la mer Caspienne. Il pratique le dessin et la peinture dès l’âge de 12 ans ; il prend des leçons dans un cours privé, en commençant par copier les maîtres européens, mais aussi les portraits et paysages russe du début du XXe siècle. Après avoir terminé sa scolarité, il entre au département des Beaux-Arts de l’université de Téhéran, avant d’intégrer, quatre ans plus tard, l’École nationale supérieure des beaux-arts de Paris, dont il sort diplômé.
Farhad Ostovani a beaucoup voyagé au Moyen-Orient et a vécu en Égypte, aux États-Unis et en Italie. En 1983, il s’installe à Rome pour quatre ans. Il entame à cette époque une réflexion sur le jardin d’Alioff, le jardin mythique de son enfance. Ce premier travail engendrera d’autres séries, dont une consacrée à l’arbre et une autre à l’horizon. Sa première exposition a lieu à l’Institut français de Téhéran.
En 1994, il rencontre le poète Yves Bonnefoy et le directeur du musée Jenisch Vevey, Bernard Blatter. Naît alors une amitié qui aboutit à de nombreuses expositions et publications.
À partir de 2008, après avoir consacré de longues années de travail à des œuvres inspirées par les Variations Golbderg, de Jean- Sébastien Bach, Farhad Ostovani, en résidence à la fondation Bogliasco, en Ligurie, près de Gênes, entreprend une autre série inspirée par les Suites pour violoncelle seul, du même compositeur. Il retourne à la fondation en 2013, pour terminer son projet sur la première de ces suites. De nouveau invité en résidence en février-mars 2021 il achève un projet d’une série d’œuvres inspirées par la Vita Nuova de Dante. La même année, il commence un autre projet sur Ulysse de Joyce qui s’intitule : La coscienza dell’acqua in Ulisse.
Les œuvres de Farhad Ostovani ont fait l’objet d’innombrables publications et expositions dans les Musées et les Galeries du monde entier.